L’Université de Strasbourg peut s’enorgueillir d’avoir été choisie pour être l’écrin de la 51e session plénière du conseil scientifique du Conseil européen de la recherche (ERC), qui s’est tenue dans les locaux de la Faculté de chirurgie dentaire du 1er au 3 juin dernier. L’occasion de rappeler d’abord le rôle primordial de la recherche fondamentale, dont nous sommes nous, universitaires, convaincus, mais qui reste inlassablement à promouvoir. L’ERC porte haut cet idéal : soutenir des projets sur la base uniquement de la curiosité, de la ténacité des chercheurs, de leur originalité, mais sans programmation thématique, ni quotas géographiques ou disciplinaires : c’est cela, tout simplement, l’excellence ! Pour réaliser cet idéal, l’ERC a besoin du soutien dans le long terme de toute la société et des décideurs politiques.
L’ERC est le plus bel outil qui nous soit donné, et pourtant, il reste ignoré de l’extérieur, et même menacé de l’intérieur. Pourquoi le manque de résonance qu’a eu cet événement dans la presse nationale ? Faut-il y voir une illustration de plus du manque d’intérêt porté à la recherche qui ne produit pas de résultats immédiats ? L’Union européenne avait même le projet de réduire les budgets de l’ERC et des bourses Marie Sklodowska Curie pour alimenter le Fonds européen pour les investissements stratégiques (le « plan Juncker »). Nous venons d’apprendre qu’ils seront préservés. L’action de la LERU a certainement contribué à ce revirement. Réjouissons-nous de cette lucidité bien tardive !
Cette session était aussi une formidable opportunité pour la communauté universitaire strasbourgeoise d’aller à la rencontre de Jean-Pierre Bourguignon, président de l’ERC, et de son équipe mercredi 3 juin après-midi pour appréhender les enjeux des financements européens de la recherche mais aussi d’écouter les témoignages de deux lauréats récents de bourses de recherche. Échanges riches et questions nombreuses avec une assistance qui aurait pu, elle, être plus fournie.
Tout cela nous encourage à rester optimistes et à poursuivre le combat pour la cause de la recherche. Des éléments très positifs nous y invitent. Comme le rappelait Jean-Pierre Bourguignon, « la France a obtenu de bons résultats dans les concours de l'ERC, avec des taux de réussite au-dessus de la moyenne européenne, ce qui démontre qu'elle possède une base de recherche forte avec beaucoup de personnes de talent soucieuses de développer leurs idées brillantes et ambitieuses ». Aujourd’hui ce sont plus de 35 bourses ERC qui ont été attribuées à des chercheurs strasbourgeois, ce qui fait de notre site l’un des plus doté en France et certainement le plus efficient dans ce domaine. Réjouissons-nous de ces bonnes nouvelles !
Alain Beretz
Président de l'Université de Strasbourg
Le colloque annuel de la Conférence des présidents d’université (CPU) a réuni 320 membres de la gouvernance universitaire du 27 au 29 mai derniers à l’Université de Strasbourg autour du numérique. Retour sur l’événement avec Jean-Yves Pabst, vice-président Finances et Stratégie du numérique, et Philippe Portelli, directeur de la Direction des usages du numérique.
Un colloque de la CPU consacrée à « l'Université 3.0 » : en quoi était-ce important ?
Jean-Yves Pabst (JYP) : C’était essentiel parce que le numérique traverse les universités ; il irrigue toutes nos missions avec l’évolution numérique des cours (les Moocs, les serious games, etc.) et l’impact sur les infrastructures de recherche avec la massification des données. Il fallait en parler pour notamment sensibiliser les collègues. Lors de la préparation du colloque, à laquelle j’ai participé, nous avions un doute sur l’intitulé du colloque, « Université 3.0. », nous craignions que ça ne fasse peur aux participants.
Philippe Portelli (PP) : La forte présence au colloque – plus de 300 personnes – montre un réel signe d’intérêt pour le sujet et illustre bien la prise de conscience du milieu universitaire concernant les changements induits par le numérique pour la conduite de nos missions.
Les universités françaises sont-elles à l'aise avec le numérique ? Comment se situent-elles sur cette question au niveau européen/mondial ?
JYP : Il y a beaucoup d’inégalités entre les établissements en France tant au niveau des équipements que des usages du numérique. Par rapport à l’international, nous avons eu une discussion avec le philosophe Bernard Stiegler lors de sa venue ; nous remarquions que la France est en retard pour ce qui est des équipements par rapport à d’autres pays de l’Union européenne, mais surtout aux États-Unis et à la Chine. Cependant, nous pouvons les rattraper grâce à notre très bonne école de mathématique et à notre capacité de réflexion sur le sujet. Il ne faut donc pas partir battu dans ce projet de mise à niveau.
PP : Notre système est celui d’une université républicaine, qui vise l’équité pour tous et l’accessibilité à tous, à la différence d’autres systèmes d’enseignement supérieur. Nous ne sommes pas à la traîne, nous avons une organisation qui distribue les priorités autrement. C’est une stratégie en soi. La technologie avance plus rapidement que l’appropriation pédagogique ; notre travail de médiation consiste à faire en sorte que les deux restent en contact.
Dans quel état d’esprit sont repartis les participants ? Avaient-ils le moral dans les chaussettes ?
JYP : Non, au contraire, ils étaient plutôt positifs. Ce colloque leur a montré que le numérique n’est pas une question d’investissement mais plutôt une manière de penser, ce qui se vérifie notamment pour les outils de pédagogie comme les classes inversées par exemple.
PP : Je n’ai pas ressenti d’inquiétudes particulières sur les évolutions nécessaires pour la pédagogie et la formation, mais la question de la reconnaissance de l’investissement des enseignants, notamment lié à la progression du numérique, reste centrale et provoque de véritables interrogations. Il y a aussi eu un questionnement concernant les données de recherche et la manière de leur assurer une vraie visibilité contrôlée et de les sécuriser en même temps.
Concernant les conclusions du colloque, les dix propositions formulées par la CPU vous paraissent-elles pertinentes ?
PP : Elles traduisent bien les points nécessaires à travailler ensemble ou individuellement, les propositions s’adressant à la fois au ministère et aux établissements. Elles montrent bien qu’on s’est déporté du simple débat technologique au profit d’un débat de fond sur la conduite de nos missions.
Comment seront-elles mises en œuvre à l'Unistra ?
JYP : Le colloque et ses conclusions m’ont conforté dans la manière de construire le schéma directeur du numérique (SDN) 2015-2020 qui sera présenté le 1er juillet prochain au comité d'orientation stratégique du numérique. Le SDN pourra être recentré sur les usagers avec des mesures comme la certification informatique et internet (C2i) pour tous ou la conception d’espaces destinés à accueillir des pratiques d’enseignement collaboratif intégrant le numérique. La lettre d’orientation budgétaire 2016 laissera aussi une place plus importante au numérique avec quatre priorités.
Par ailleurs, l’Unistra s’appuie et va s’appuyer davantage sur les dispositifs de l’État comme les Investissements d’avenir, avec notamment les appels à projets Initiatives d’excellence en formations innovantes (Idefi-N) pour financer ces différentes actions.
Propos recueillis par Caroline Laplane et Floriane Andrey
Pour la première fois depuis sa création, le Conseil européen de la recherche (ERC) a réuni les membres de son conseil scientifique en plénière en France, à Strasbourg. Cette visite a également été l’opportunité de présenter l’ERC à la communauté scientifique strasbourgeoise et de lui donner les clefs et la motivation pour candidater, tout comme a pu le faire Joseph Moran, l’un des deux lauréats alsaciens en 2014.
Vous êtes arrivé à l’Université de Strasbourg et à l’Institut de science et d'ingénierie supramoléculaires (Isis) en 2012, pourquoi ce choix ?
Après avoir fait ma thèse au Canada, je suis parti en post-doctorat au Texas. Ensuite, j’ai cherché un poste d’enseignant-chercheur. Malheureusement au Canada, il n’y avait alors aucune opportunité dans mon domaine. J’ai donc postulé dans différentes universités aux États-Unis. Je n’envisageais pas du tout la France à l’époque mais mon directeur de post-doctorat, lui-même ancien post-doc de Jean-Marie Lehn m’a parlé d’un recrutement en cours à l’Isis. Pour moi, c’était très intéressant car l’excellence de la recherche en chimie menée à Strasbourg, et à l’Isis en particulier, est mondialement reconnue. En plus, lorsque vous obtenez un poste de professeur assistant à l’Isis, vous montez et créez votre propre équipe. On vous donne votre indépendance, sur un modèle anglo-saxon. C’est un challenge car il faut trouver une thématique qui fonctionne, des financements, recruter des collaborateurs, etc. Mais je voulais relever ce défi excitant.
Votre recherche de financement a été fructueuse puisque vous avez obtenu une bourse ERC en 2014. De quoi s’agit-il ?
L’ERC a un processus de sélection très poussé et je suis ravi d’avoir été sélectionné. J’ai effectivement obtenu un financement de 1,5 million d’euros pour cinq ans (2015-2020). Il s’agit d’une bourse Starting Grant. Elle est accessible aux jeunes chercheurs qui ont entre deux et sept ans d’expérience après leur thèse. Contrairement à d’autres types de financements, elle soutient un chercheur et son projet de recherche. Les seuls critères de sélection : l’excellence scientifique et la preuve de l’indépendance intellectuelle du projet soumis ! À souligner également, l’ERC a pour vocation de soutenir des projets dits exploratoires où il peut y a voir une forte part de « risque » de ne pas réussir à répondre à la problématique. L’idée est de faire progresser la connaissance au travers de projets de recherche fondamentale.
Justement, pouvez-vous nous expliquer le projet de recherche qui a séduit l’ERC ?
En thèse et en post-doctorat, je me suis intéressé à la catalyse et à la synthèse organique c’est-à-dire la fabrication de molécules contenant du carbone. Je me suis rendu compte que lorsque l’on essaye d’imiter la nature, on n’utilise presque jamais les mêmes matériaux de départ que dans les systèmes biologiques, car l’on est incapable de reproduire le travail des enzymes, les catalyseurs biologiques. Ma réflexion m’a amené à m’interroger sur les origines de la vie et à me poser une question centrale : quels ont été les catalyseurs essentiels pour initier la vie et les réactions chimiques primitives ?
Avec le financement ERC, j’aimerais répondre à cette problématique. Nous allons nous focaliser sur le métabolisme de fixation du carbone, et en particulier décortiquer étape par étape le cycle réducteur de l’acide citrique. C’est une succession de réactions chimiques très simples permettant d’ajouter un carbone à chaque étape. Notre objectif est de le reproduire non pas à l’aide d’enzymes, mais bien à l’aide de catalyseurs chimiques.
À quoi va servir votre financement ?
Les fonds ERC vont me permettre de recruter trois doctorants sur trois ans et deux post-doctorants sur deux ans et donc d’avoir une équipe de trois personnes en moyenne sur cinq ans entièrement dédiée au projet. Les autres financements que je pourrai obtenir permettront bien sûr de renforcer ponctuellement l’équipe. Mais sans la bourse ERC je ne pourrais pas faire tourner mon laboratoire. L’ERC a, à mon sens, un impact énorme sur la recherche européenne et est essentiel à sa survie, son essor et à la rendre compétitive au niveau international.
Propos recueillis par Anne-Isabelle Bischoff
Aude Chatelard, représentante du regroupement Université de Strasbourg - Université de Haute-Alsace à la finale nationale du concours Ma thèse en 180 secondes, n'a pas remporté de prix mais a réalisé une belle performance, à l’image de tous les participants.
C’était à Nancy mercredi 3 juin. Les 27 lauréats de l’édition 2015 se sont retrouvés pour la finale nationale du concours Ma thèse en 180 secondes. Toutes et tous avaient pour objectif d’expliquer leur sujet de recherche en termes simples afin de séduire le public, venu nombreux assister à cet événement, et le jury ! Aude Chatelard*, doctorante à l’Université de Strasbourg, a défendu les couleurs de l’université avec sa thèse intitulée « Femmes citoyennes et pratiques religieuses dans l’Italie romaine (territoire romain et colonies), du 4e siècle avant J.-C. à la fin de la République ». Elle ne se retrouve malheureusement pas sur le podium malgré une très belle prestation sans accrocs.
C’est Alexandre Artaud de l'Université Grenoble-Alpes (à droite sur la photo) qui remporte l'édition 2015 de Ma thèse en 180 secondes. Il remporte également le prix du public remis par Marie-Charlotte Morin de l’Université de Strasbourg, grande gagnante de la finale nationale l’an passé et deuxième de la finale internationale 2014. L’occasion d’apprendre que forte de son expérience, elle s’apprête à remonter sur les planches dans une pièce de théâtre, traitant de science bien évidemment. Rachida Brahim de l'Université Aix-Marseille remporte le 2e prix. Grégory Pacini de l'Université Sorbonne Paris Cité, s’est vu remettre le 3e prix. Les trois candidats primés participeront à la finale internationale le 1er octobre 2015 à Paris. Ils concourront alors aux côtés des représentants de sept pays francophones : la Belgique, le Burkina Faso, le Cameroun, le Maroc, le Québec, le Sénégal et la Tunisie.
Frédéric Zinck
* Elle effectue ses recherches, dirigées par Michel Humm, au sein du laboratoire Archéologie et histoire ancienne : Méditerranée – Europe (Archimède) de l’Université de Strasbourg.L'élection de la nouvelle équipe à la tête de l'Assemblée des directeurs d'IUT (ADIUT) s'est déroulée jeudi 21 mai dernier à Caen : Bernard Lickel, directeur de l'IUT Robert-Schuman, a été élu président. Il succède à Guillaume Bordry, directeur de l'IUT Paris-Descartes.
La nouvelle équipe de Bernard Lickel s'inscrit dans la continuité du bureau précédent pour représenter les IUT et affirmer leur position dans le paysage universitaire français. Il s’agira de maintenir les missions d’enseignement, de professionnalisation, d’insertion et de recherche à un haut niveau de qualité́. Les IUT continueront de porter les valeurs que sont la réussite des étudiants, l’innovation pédagogique, la diversité́ des publics, l’implantation géographique dans les territoires. Sont d’actualité́ l’adaptation de la formation tout au long de la vie à la reforme de la formation professionnelle, le développement d’une démarche qualité́, et la place des IUT dans les regroupements d’universités en cours.
Pour ses actions, le nouveau président, Bernard Lickel, peut compter sur la force d’un réseau structuré et d’une équipe élue à ses côtés. À noter la présence d'Alexandra Knaebel, directrice de l’IUT Louis-Pasteur de Schiltigheim, en tant que vice-présidente de la commission recherche, innovation et transfert de technologie.
Envoyez votre info à lactu@unistra.fr avant le mardi 16 juin midi pour une parution le vendredi 19 juin 2015. Consultez les dates des prochains numéros.