Coût moyen par étudiant, coût par diplôme, par composante : après la mise en place d’une méthodologie complexe, le groupe de travail chargé d’évaluer le coût de l’offre de formation a rendu public ses conclusions. Tour d’horizon avec Nathalie Vincent, directrice générale adjointe d’appui aux missions et copilote de la mission. 

Concrètement, que nous apprend cette évaluation des coûts de formation ?
On n’a pas vraiment eu de surprises. Les résultats des calculs sont en phase avec nos intuitions : les formations en sciences dures sont plus coûteuses que les formations en sciences humaines. Les formations en école et en IUT sont les plus coûteuses par étudiant, les moins coûteuses se trouvent en Droit, économie et gestion ou en Arts, lettres et langues. Les grandes cohortes font mécaniquement baisser les coûts.
Le coût moyen d’un étudiant à l’Unistra est de 4 764 euros, avec des disparités allant de 1 à 4 selon les domaines disciplinaires. Ce qui renchérit le coût, dans la formation, c’est surtout le volume d’heures par étudiant : le nombre d’options, la taille des groupes proposés, en regard des effectifs étudiants. D’autres facteurs sont importants, comme le taux d’encadrement dont bénéficie une composante, puisque la masse salariale constitue la part la plus importante des coûts.
Bien sûr, cela ne veut pas dire qu’il faut stigmatiser les formations coûteuses : les indicateurs doivent éclairer les choix, c’est tout ; lorsque ces choix sont possibles. 

Pourquoi faut-il avoir les idées claires sur les coûts de formation ? A qui servent ces données ?
Ces données sont nécessaires pour l’aide au pilotage. Elles servent donc à la gouvernance pour le niveau central, et aussi pour les composantes. Elles seront également précieuses pour la construction de l’offre de formation qui sera mise en place en 2018, car l’Université devra faire la preuve de sa soutenabilité économique.
Par ailleurs, la bonne connaissance des coûts de formation dans leur structure entre également dans un processus d’amélioration continue. Bien se connaître, pour bien s’évaluer et dégager des marges de progression.
Dans notre université, le besoin a émergé peu de temps après la fusion, quand nous avons constaté que nous avions une charge d’enseignement très élevée au regard de notre potentiel d’enseignement (1,7 fois le potentiel net), alors que le contexte financier et le passage aux responsabilités et compétences élargies nous poussaient à mieux maîtriser nos coûts.

Et comment fait-on pour évaluer les coûts de formation ?
En schématisant, il faut croiser de nombreuses données qui permettent d’évaluer ces coûts : celles du compte financier de l’université, celles du système de gestion des heures d’enseignement, celles du système d’information de la scolarité, qui permet notamment de savoir combien d’étudiants sont inscrits dans chaque enseignement. Nous avons pu ainsi déterminer le volume d’heures moyen dont bénéficie un étudiant dans un diplôme donné, voire dans chaque élément de diplôme.
D’abord, on a pu établir un coût en heures par diplôme et par étudiant. Puis, dans un second temps, un coût complet, c’est-à-dire un coût environné, qui inclut les frais connexes à la formation : fonctionnement, fluides, coût des services centraux, etc. On dispose donc aujourd’hui d’un coût environné par composante pour une heure d’enseignement. En rapprochant cette donnée de la charge d’enseignement, on a le coût complet par diplôme.
C’est un travail inter-services copiloté par Marc Munschy et moi-même qui réunit des experts du Service d’aide au pilotage, de la Direction des études et de la scolarité, de la Direction des finances, de la Direction des ressources humaines et de la Direction informatique. Nous avons beaucoup travaillé sur la méthodologie, car en matière de comptabilité analytique, il faut faire des choix qui permettent de déterminer la méthode la plus juste. Par chance, à l’Université de Strasbourg, nous disposons de données fiables grâce aussi au travail réalisé en composantes. Ce n’est pas le cas dans tous les établissements. 

Comprendre et maîtriser les coûts de formation, c’est une préoccupation qui monte dans les établissements d’enseignement supérieur. Où en sommes-nous par rapport aux autres ?
A priori, nous sommes très en avance. Nous avons été auditionnés par l’Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) en 2014, qui travaillait à un rapport publié tout récemment sur La gestion des heures d’enseignement au regard des formations supérieures (juin 2014), à la suite de quoi on m’a demandé de présenter  à l’ensemble des inspecteurs généraux notre méthodologie des coûts complets. Maintenant, le ministère a mis en place un groupe de travail qui a pour objectif de définir une méthodologie pour l’ensemble des établissements et on participe bien sûr aux travaux.
Pour nous, l’étape suivante consistera à rapprocher les dépenses des recettes, pour analyser l’équilibre financier par formation, clé de la fameuse soutenabilité. C’est notre prochain grand chantier.

Propos recueillis par Caroline Laplane